Wagyu. Gras.

Mes amis vous le diront, je suis capable de manger GRAS.

J’aime le tablier de sapeur, le gras et la couenne du jambon blanc, la pata negra, la peau du magret, le gras de l’entrecôte, la peau du poulet bouillie, le Fried Chicken américain.

Mais avec le wagyû, j’ai du mal.

 

wagyu de kagoshima
Wagyu de Kagoshima. Kurogé Washu.

 

Le wagyû – littéralement « bœuf japonais » désigne le bœuf des races japonaises Kurogé Washu (Japanese Black), Akagé Washu (Japanese Brown), Nihon Tankaku Washu (Japanese Shorthorn) et Mukaku Washu (Japanese Polled). Le Kurogé représente 90% du wagyu. « Kobé » «Matsusaka » « Ômi » sont des marques, correspondant en partie aux lieux d’élevage mais aussi à des critères qui ne sont pas communs à toutes les appellations.

En clair, cette histoire de wagyû est très nébuleuse.

Car en plus de ça, il y a des classifications selon le degré de graisse intermusculaire, la tendreté de la viande etc etc. Mais qui semblent être définies de façon un peu boueuse…très japonaise.

 

Vue de la coupe
Vue de la coupe

 

En tout cas, d’après le Ministère de l’agriculture japonais, le wagyû doit être une race à viande selon l’article 12 du Code de la concurrence loyale définie par la JFFTC (Japan Federation of Fair Trade Conferences), née et élevée au Japon. Le wagyu élevé en dehors du Japon ne peut pas être commercialisé au Japon sous le nom de « wagyû. »

De ce que j’ai vu, le vrai wagyû est persillé beaucoup plus uniformément et intensément que le wagyû hors Japon qui semble conserver une couleur plus rouge. Il parait que la graisse dans le muscle, qui donne ce persillé excessif, est meilleure pour la santé que la graisse se trouvant au bord du muscle, car plus riche en oméga 3 et 6, avec moins d’acides gras saturés. Cela n’empêche que j’ai toujours du mal à manger le wagyû. On a vraiment l’impression d’écraser une éponge imbibée de graisse dans la bouche.

Sur certains morceaux, on a l’impression que c’est le blanc qui est persillé de rouge…Une graisse blanche dans laquelle on aperçoit des petites taches rouges. À tel point que je me demande comment font ces bœufs pour bouger…Les muscles peuvent-ils fonctionner avec des fibres musculaires aussi saturées de gras ?

 

Wagyu de Shinshu
Shinshu Premium Beef

 

Cela peut être ma digestion qui faiblit avec l’âge mais autrefois, le wagyû ne semblait pas si gras. Je ne me souviens pas que la viande chez le boucher était d’un rose si pâle. De nos jours, elle est presque blanche. Et ça, je m’en souviendrais, quand même. Une viande rouge qui est blanche…?

Le wagyû est bon en shabu-shabu, cette sorte de fondue dans laquelle on plonge avec ses baguettes, la viande coupée en tranches très fines comme un carpaccio. On trempe la viande ainsi cuite dans une sauce salée-acide et souvent sucrée, comme du ponzu, de la sauce sésame, avec du daikon râpé et un peu de piment rouge. L’acidité et le daïkon rafraichissent beaucoup la viande qui a déjà perdu presque toute sa graisse dans le bouillon.

Lorsque je fais du shabu-shabu chez moi à Paris avec du carpaccio de chez le boucher du quartier, c’est beaucoup trop sec.

Mais autrement, le wagyû poêlé, grillé ou rôti…est trop gras.

 

vue à la coupe
Vue à la coupe.

 

J’ai eu la chance récemment de recevoir en cadeau deux grosses pièces de wagyû, l’une arrivée du Japon dans une valise (chut !), l’autre importé du Japon. C’était deux wagyû de très bonne qualité.

Ce soir j’ai essayé le premier des deux, en niku-don.

C’était bon mais cela aurait peut-être été meilleur avec le carpaccio – nettement moins gras – du boucher du quartier (qui fait un très bon bœuf du Cantal)

Le wagyû grillé, en steak, ne me semble bon qu’en petites quantités bien dorées et accompagné de quelque chose qui rafraichit, comme du wasabi frais, du daikon ou du ponzu.

Et beaucoup plus de sel qu’un steak normal pour contrebalancer le gras excessif.

À minimum 150€ le kilo au Japon, plus de 250€ le kilo en France (et il s’agit là de minimum…) cela vaut-il vraiment le coup ?

Recette de niku-don ultra simple pour 1 personne :

  • 100 à 150g de bœuf en fines tranches
  • 1 oignon en lamelles
  • 1 cuillère à soupe de sucre
  • 1/2 à 1 cuillère à soupe de saké
  • 1 cuillère à soupe de sauce soja
  • Un grand bol de riz nature
  • Un peu d’huile (l’huile n’est pas nécessaire avec le bœuf est suffisamment gras)

Faites suer l’oignon dans l’huile à feu moyen ou doux, ajoutez le bœuf.

Lorsque celui-ci est presque cuit, ajoutez le sucre, le saké et la sauce soja.

Mélangez bien et servez sur le riz.

Agrémentez de graines de sésame blanc et d’un peu de shichimi-tôgarashi si vous en avez.

Ce soir, je n’avais pas d’oignons. C’est meilleur avec, mais s’il n’y en a pas, ce n’est pas trop grave.

Les quantités de sucre, saké et sauce soja sont à adapter selon les goûts de chacun mais il vaut mieux commencer par le sucre et finir par la sauce soja car cette dernière fait durcir la viande.

Même si je dis plus haut que le wagyû est trop gras, une viande un peu grasse comme l’entrecôte ou la basse-côte est meilleure pour cette recette.

Post-scriptum: depuis que la question m’intrigue, je demande à tous mes amis et connaissances japonais qui connaissent à la fois le wagyû et le bœuf « non wagyû » ce qu’ils préfèrent. Tous me répondent un bon bœuf rouge bien saignant. Et ceux qui ont plus de 35 ans me disent que le wagyû, bon autrefois, est devenu trop gras…

Post-post-scriptum: la viande figurant sur les photos ci-dessus a été coupée par moi, c’est à dire au pif, sans aucune considération pour le sens de la fibre etc. Ce n’est ni un cuisinier ni un boucher qui l’a fait…