J’ai rencontré Amandine Chaignot, aujourd’hui Chef du Raphaël, la veille de son départ du Crillon, au printemps dernier. J’ai vu une femme, jeune, blonde, jolie, aimable et pas coincée du tout, pleine d’assurance, d’ambition et de joie de vivre.
Il y avait en elle un éclat, comme le rayon de soleil qui nous prend par surprise entre deux arbres dans une forêt. Mais j’avais des doutes quant à ses capacités car elle me semblait trop “normale”. La jeune fille d’à côté, quoi, en jean et chemise. Pas l’étoffe d’un chef des cuisines d’un grand hôtel, univers toujours aussi masculin, dur et exigeant malgré la présence de femmes en cuisine qui n’ont rien changé, à part quelques coiffures un peu différentes – et encore, certains chefs maintenant portent les cheveux longs avec des serre-tête, la coiffure n’est même plus une prérogative féminine.
Et puis, un jour, j’y vais. Au Raphaël. Amandine est là, exactement pareille à la fois où nous avions pris un thé ensemble, sauf qu’elle était en “uniforme” de chef. Elle me dit un bonjour avec son sourire franc et ouvert, et disparait aussitôt en cuisine. Et les plats arrivent…
Quenelles de volaille aux morilles. Les quenelles sont douces, fondantes et tendres, tout en étant solides avec une certaine mâche. Les morilles sont parfaitement préparées, juteuses d’un jus puissant au pissenlit.
Langoustines façon Thermidor, céleri et pommes étuvées.
Sardines marinées et quinoa.
Escabèche de calamar. J’adore!
Ce n’est pas une cuisine “fusion”, les bases sont classiques. Pas de citronnelle, de myoga, de miso. Tant mieux, j’en ai un peu marre de la globalisation abusive.
Il y a une grande puissance, parfois même une certaine rugosité, mais qui n’est pas rustique. Plutôt urbaine voire sophistiquée. Une fougue qui frappe au visage, difficile à expliquer: elle a envie, envie, envie…de quoi? de réussir? de satisfaire le client? de s’exprimer? Je ne sais pas trop mais l’émotion est là. Forte, déterminée, inébranlable.
En tout cas, que les vieux machos qui s’imaginent que parce que c’est une femme, parce qu’elle est jeune, parce qu’elle est blonde, parce qu’elle a un joli sourire, et parce qu’elle est sympathique, il ne faut pas la prendre au sérieux, s’avisent.
Ah oui. Un point important: un des meilleurs rapports qualité/prix de Paris actuellement. 58€ pour le menu déjeuner. 120€ pour le menu dégustation du soir.
Raphaël le restaurant
Hôtel Raphaël
17 avenue Kléber
75116 Paris
Tél: 01 53 64 32 11
© copyright photos Richard Haughton www.richardhaughton.com